Grossesse – Mon premier accouchement #récit

Je n’ai jamais encore parlé de mes accouchements ici. Sans doute par pudeur. Ou par sentiment que mes accouchements n’ont rien eu d’exceptionnel. Et pourtant, j’aime les récits d’accouchement. Je prends plaisir à lire ceux sur lesquels je tombe et j’aime écouter Bliss Stories pour voir comment les autres femmes ont vécu les leur. Je trouve que ces témoignages sont précieux pour toutes celles qui cherchent à en savoir plus sur l’accouchement, sur ce qui existe, sur ce dont nous, les femmes, sommes capables d’accomplir. Alors j’ai décidé qu’il était temps que je parle de mes accouchements. A commencer par le premier. 

Il n’y a pas si longtemps, je vous faisais enfin le récit de ma première grossesse. Je terminais ce récit au soir du 29 décembre, quand les contractions ont vraiment débuté. C’est là, que je commence donc aujourd’hui mon récit.

Ce soir-là, une amie, qui était également la responsable de la maison de thé dans laquelle je travaillais alors, était passé nous voir pour nous souhaiter un joyeux Noël, une bonne année et une belle rencontre avec notre bébé. Elle nous a quitté vers 21h: heure vers laquelle mes contractions ont commencé. J’ai tout de suite senti que ces contractions n’avaient rien à voir avec celles que j’avais pu ressentir de temps à autre jusqu’à présent.

J’en ai parlé à Papa Lou et puis nous nous sommes installés devant un film, espérant arriver à nous détendre encore quelques heures. Je pensais naïvement que la rencontre n’était plus si loin que ça… 

Les heures passaient. Les contractions étaient intenses, mais elles n’étaient pas régulières. Parfois toutes les 5 minutes, parfois toutes les demi-heure. Nous avons finalement choisi d’aller nous coucher. 

J’ai dormi entre les contractions. Je me réveillais donc toutes les demi-heures environ. A 4h du matin, elles étaient de plus en plus intenses et rapprochées. Toutes les 5 minutes. J’ai décidé de prendre un Spasfon, comme on me l’avait conseillé, et de prendre un bain. J’ai réveillé Papa Lou et il m’a aidé à entrer dans l’eau. A présent, j’en étais sûre, nous allions rencontrer notre bébé très bientôt…

Le bain m’a fait beaucoup de bien. Les contractions étaient moins douloureuses. J’ai pu me reposer un peu, j’ai même somnoler sous la surveillance de Papa Lou. Après avoir re-remplit la baignoire plusieurs fois, alors qu’il n’y avait plus d’eau chaude, je suis finalement sortie de l’eau. Mais mes contractions avaient diminué en intensité et en régularité. Il était 7h du matin et Papa Lou a fait le choix de partir travailler. J’avais pour consigne de l’appeler dès que les contractions seraient à nouveau régulières.

30 décembre. A ce moment-là, seule, je ne savais pas trop quoi penser. Je pensais naïvement qu’un accouchement ne duraient que quelques heures. Je n’ai eu autour de moi à cette période que des récits d’accouchement relativement rapide – 6h pour ma mère pour moi sa première! entre sa première contraction et notre rencontre. Je ne me suis pas trop renseignée sur le sujet, comme je l’expliquais dans l’article précédent. Certainement par déni, par peur aussi. Et comme mes contractions n’avaient pas la régularité que l’on m’avait indiqué à l’hôpital pour m’y rendre, je n’ai pas non plus osé les déranger…

Impossible d’avaler un petit déjeuner, je me suis mise devant la télé en espérant me distraire et que les contractions reviendraient rapidement à un rythme plus régulier. Autant les contractions restaient intenses (elles m’obligeaient à me mettre à quatre pattes au sol à chaque fois) autant elles ne se rapprochaient plus. J’en avais une toutes les trente minutes et ça a été ainsi toute la journée. En milieu de journée, en allant aux toilettes, j’ai remarqué que j’ai perdu le bouchon muqueux. En fait, je ne savais pas ce que c’était et je suis allée faire une recherche sur Internet parce que ça me semblait bizarre…  J’ai finalement réussi à grignoter le midi. J’ai réussi entre deux contractions à préparer le repas du soir: des aiguillettes de poulet à la crème de citron et du riz. Je m’en souviens comme si c’était hier. Je me vois encore à quatre pattes dans la cuisine au moment d’une contraction…

Papa Lou est rentré du travail vers 19h. Nous avons dîné. Mais j’avais tellement mal, j’étais tellement épuisée que je n’arrivais plus à m’assoir sur une chaise pour manger. J’ai dîné debout devant la table entre deux contractions. Subitement vers 20h, les contractions ont repris en régularité. . J’ai hésité à partir à l’hôpital à plusieurs reprises entre 20h et 22h. Et puis, j’ai eu des contractions encore plus intenses toutes les 5 minutes. J’avais un pressentiment. Je n’arrêtais pas de dire que » j’ai peur pour le coeur de mon bébé »… 

A 22h, nous avons appelé une ambulance. Mais un 30 décembre au soir, il n’y a pas d’ambulance disponible à Paris. Ils sont tous en repos avant les astreintes du lendemain… Nous avons passé plus de 40 minutes à appeler toutes les ambulances de Paris. Sans succès. On nous a dit d’appeler le SAMU. Ce que nous avons fait. Nous avons attendu 10 minutes au bout du fil, personne n’a jamais décroché…

Finalement, peu avant 23h, une des ambulances nous a rappelé pour nous dire qu’ils pouvaient être sur place d’ici une demi-heure si nous étions toujours prêts à partir. Quand les ambulanciers sont arrivés, ils ont essayé de me faire assoir dans l’ambulance, mais les contractions étaient telles que je n’y arrivais plus. Ils m’ont finalement couché, mais je n’étais pas plus à l’aise, j’avais horriblement mal partout. Et les contractions devenaient de plus en plus difficiles à supporter.

A notre arrivée à l’hôpital, je me souviens avoir reçu une feuille de soin. En France, on a droit à deux déplacements en ambulance remboursés par la Sécurité Sociale au moment d’un accouchement. Je me souviens du tarif: 170€ pour même pas 10 minutes de trajet dans Paris intra-muros. J’avais trouvé ça vraiment exagéré. Mais de toute façon, nous n’avions pas de voiture et il y avait peu de chance qu’un taxi nous accepte dans mon état…

Arrivés à l’hôpital, je suis reçue à l’accueil par une femme aimable comme une porte de prison. Oui, oui j’ai mal, elle sait. On va bientôt m’ausculter. Une dizaine de minutes plus tard, une sage-femme m’ausculte et m’annonce sans ménagement que ce sont de fausses contractions, que le vrai travail n’a pas encore commencé. On va me faire un monitoring et je peux rentrer chez moi. J’ai cru qu’elle se moquait de moi. Déja je ne savais pas qu’on pouvait avoir un faux travail et je ne me voyais pas rentrer chez nous dans l’état dans lequel j’étais. Je me suis mise à pleurer. Mes contractions étaient toujours très intenses et régulières. Mais apparemment, mon col n’était même pas ouvert à 1cm…

Il devait être minuit quand on m’a branché à un monitoring avec pour consigne de rentrer chez moi 30 minutes plus tard. J’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. Papa Lou ne savait plus quoi dire pour me rassurer, ni quoi faire pour me soulager. Car accessoirement, mes fausses contractions n’en demeuraient pas moins intenses. La sage-femme est revenue à deux reprises pour remettre le monitoring en place et me dire d’arrêter de bouger, qu’ils ne voyaient pas les données apparaître sur leur écran dans la salle des sages-femmes parce que je bougeais trop. Je pleurais toujours. Je lui ai dit que je ne pouvais pas rentrer dans cet état. J’avais trop souffert toute la journée, j’étais épuisée, je n’en pouvais plus. Je n’y arriverai jamais. Je ne me souviens même pas ce qu’elle m’a répondu, mais en gros que de toute façon, ce n’était que le début… Et elle est repartie.

31 décembre. La sage-femme est finalement revenu moins de dix minutes plus tard pour me mettre dans une chambre, en attente car les résultats du monitoring n’étaient pas convaincant. Je pouvais rester à l’hôpital quelques heures de plus, le temps d’être sûre que tout va bien pour mon bébé.

On m’a installé dans un vrai lit, avec un nouveau monitoring. Et puis moins de dix minutes plus tard, une dizaine de personnes sont entrés dans la chambre en même temps. On m’a dit que le bébé était en souffrance, que son coeur avait de grosses faiblesses, qu’il fallait tout de suite me faire une césarienne. Je n’ai rien compris. J’étais complètement en panique. Sous l’effet des contractions toujours intense et de la panique, j’ai eu le souffle coupé. Je n’arrivais plus à respirer.

On m’a emmené avec mon lit en salle d’accouchement. On m’a posé des documents à signer sur le lit alors que je pleurais et que je n’arrivais plus à reprendre mon souffle. Les gens avaient l’air paniqué autour de moi. Papa Lou a dû partir. Je n’ai rien compris. En fait, ils l’ont emmené mettre une blouse avant de me rejoindre.

Dans la salle d’accouchement, enfin une sage-femme compatissante était à mes côtés. Elle a vu ma détresse et elle a essayé de me calmer. On ne pouvait pas me poser de péridurale à cause du coeur du bébé. Elle a collé sa tête contre la mienne, m’a tenu la tête et me disait de respirer en même temps qu’elle, de caler ma respiration sur la sienne pour reprendre mes esprits. Ca a marché au bout de quelques minutes.

Elle m’a promis de me chercher du gaz hilarant pour m’aider à supporter les contractions le temps que je puisse avoir la péridurale. Alors que j’ai réussi à me calmer, le coeur de mon bébé a repris un rythme normal. Le médecin a décidé qu’il fallait rompre la poche des eaux pour faire avancer le travail et que la césarienne n’était finalement pas nécessaire.

A ce moment-là, ils ont remarqué que j’étais brûlante de fièvre. On m’a branché une intraveineuse d’antibiotiques. Entre le monitoring sur mon ventre, l’intraveineuse d’antibiotiques dans un bras, une perfusion d’eau sucrée dans l’autre bras, le tensiomètre branché en continu, allongée en position gynécologique, il m’était impossible de bouger, ni de gérer mes contractions. Heureusement, la sage-femme est arrivée avec le gaz hilarant. Ce n’était pas magique, mais ça m’a bien aidé quand même.

On m’a percé la poche des eaux et en parallèle, on a jugé nécessaire de vider ma vessie avec une sonde. Je pense que la sonde urinaire est ce qui m’a le plus fait souffrir de tout mon accouchement. La sonde me brûlait affreusement et ça me brûlait encore plusieurs jours plus tard. Mais on m’a certifié que c’était normal… ce dont je doute.

Quand ils ont percé la poche des eaux, nouveau vent de panique. Encore une fois, une dizaine de personnes ont défilé dans la salle d’accouchement. Je n’avais quasiment pas de liquide amniotique. Rien n’avait été repéré sur l’échographie passée deux jours plus tôt à l’hôpital.

Tout le monde venait voir ce qui était sorti de mon utérus. Je ne comprenais pas ce qui se passait , jusqu’à ce que la sage-femme m’explique finalement que je n’avais plus beaucoup de liquide amniotique et que mon bébé pouvait être en danger. Finalement, on m’a dit qu’à la naissance il faudra vérifier que tout va bien pour mon bébé, qu’on était encore sûr de rien.

Mon col s’était ouvert, j’étais à 4cm. On m’a proposé la péridurale pour me reposer et me remettre de mes émotions. Ce que j’ai accepté. Je ne savais pas alors que la péridurale ralentissait le travail, mais de toute façon, branché comme je l’étais, je n’avais aucun moyen de faire avancer le travail…

Papa Lou et moi nous sommes endormis pour quelques heures. Mais je me réveillais régulièrement à cause des bips du monitoring et parce que je ne pouvais absolument pas bouger. Vers 5h du matin, j’ai sentie que quelque chose avait évolué. On m’a dit que j’y étais presque, que j’étais à 7cm.

Peu avant 8h, la gentille sage-femme est venue me dire au revoir. Elle terminait son service et viendrait nous voir moi et mon bébé en revenant le soir-même, mais c’est quelqu’un d’autre qui allait m’accoucher. 

La nouvelle sage-femme estimait que mon col ne s’ouvrait pas assez vite, que ça faisait trop longtemps que mon col était à 7 cm et que plus rien n’avançait. Ils ont décidé de me donner de l’ocytocine de synthèse pour accélérer le travail.

Progressivement, ma péridurale n’a plus fait effet. J’ai dû rappeler et on m’a redonné une dose, beaucoup plus forte à mon avis, car rapidement j’ai été absolument incapable de bouger mes jambes. Finalement, on m’a dit que l’heure était venue de pousser. Mais je ne sentais plus du tout les contractions. J’étais incapable de savoir quand pousser. On m’a dit de regarder sur l’écran du monitoring et de pousser quand je voyais une contraction monter. J’étais complètement perdue.

J’ai poussé n’importe comment, plusieurs fois. La sage-femme me disait que je ne poussais pas efficacement, qu’il fallait que je me mette en colère et que je pousse franchement, mais je n’avais aucune sensation. Au bout d’un moment, j’étais épuisé, on ne cessait de me crier « Poussez! Poussez! » Je n’arrivais même plus à reprendre mon souffle, mais je sentais bien que c’était totalement inefficace.

On m’a menacé de chercher le gynécologue pour une extraction car le bébé risquait d’être en souffrance. J’étais perdue. Tout le monde est sorti pour chercher le fameux médecin. Et je me suis retrouvée seule face à la sage-femme. Je crois que c’est à ce moment-là que j’ai enfin réussi à faire sortir mon bébé. Il devait être 10h20 du matin environ.

Quand le médecin est arrivé, notre bébé était né. Il était si petit. On l’a posé sur moi. J’avais les yeux plein de larmes. Des larmes de fatigue. Des larmes de joie. Des larmes de milliers d’émotions entremêlées. J’ai eu encore quelques contractions et le placenta est sorti. Ils ont fait couper le cordon à Papa Lou et ils ont repris mon bébé pour aller l’aspirer. Papa Lou l’a suivi. Je suis restée seule avec la sage femme. Je me souviens qu’elle regardait le placenta dans tous les sens et puis elle est sortie. Et j’ai été seule dans la salle d’accouchement. Je me suis mise à pleurer sans plus pouvoir m’arrêter. Et puis, quelqu’un d’autre est entré dans la salle d’accouchement pour me recoudre. Quelqu’un qui a vaguement tenté de dire quelques mots gentils qui m’ont encore plus fait pleurer.

Je ne me souviens pas du temps durant lequel Papa Lou et Little Miss Sunshine étaient partis. Mais je me suis sentie tellement seule. Et quand il est rentré dans la salle d’accouchement avec elle dans les bras, en la regardant, j’ai vu que ça y est: il était Papa. Elle avait à peine la taille de son avant-bras. Je me souviens m’être dit: « Mon Dieu! Qu’est-ce que j’ai mal fait pour avoir un aussi petit bébé? » Elle faisait 2kg670.

Nous étions toutes les deux épuisées. Elle n’arrivait pas à rester au sein, à boire sans s’endormir. Une puéricultrice est venue à plusieurs reprises pour la mettre au sein. Mais on m’a tout de suite parlé de complément. Finalement, elle a réussi à prendre un peu et on m’a laissé tranquille.

2h plus tard, deux infirmiers sont venus pour m’aider à monter dans ma chambre. Ils voulaient que je m’assois sur une chaise roulante, mais je n’avais toujours quasiment pas de sensation dans les jambes. Ils se sont moqués de moi en disant qu’il fallait que je fasse un effort, qu’ils n’allaient pas me porter. Ils ont finalement pris un lit pour me faire monter dans ma chambre.

Je pensais que j’allais enfin pouvoir me reposer un peu. Mais c’était sans compter le défilé du personnel soignant dans la chambre pour moi (parce que j’avais eu de fortes fièvres durant l’accouchement) et pour mon bébé. Sans compter non plus sur le fait que Little Miss Sunshine avait beau être épuisée, elle était aussi affamée et n’arrivait pas à téter. Personne n’a su m’aider. Certains m’ont pincé les seins jusqu’à me faire mal, d’autres ont collé sa tête contre mon sein au point que j’ai cru qu’elle allait s’étouffer, mais personne n’a réussi à m’aider. Et à chaque fois que j’appelais, c’est une autre personne qui arrivait, très souvent agacée de devoir m’aider à mettre ma fille au sein.

L’allaitement n’a pas été facile à mettre en place, mais je vous raconterai cette nouvelle étape dans un autre article…

Je ne m’en suis pas rendue compte sur le coup, car j’étais très soulagé d’avoir mis mon bébé au monde et qu’il soit en pleine forme. Mais mon accouchement a été plutôt traumatique. Et surmédicalisé. J’étais totalement perdue et en confiance avec le corps médical qui n’a pourtant pas su m’aider…  à part l’extraordinaire sage-femme qui m’a suivi et aidé toute la nuit. J’ai souvent eu l’impression d’être infantilisé, de n’être qu’un numéro, de ne pas être prise au sérieux, durant cette longue nuit…

J’ai découvert ce que la sage-femme a appelé des fausses contractions et que l’on ne devrait pas appeler ainsi. Le corps se prépare, il s’apprête à donner la vie et ces contractions, même si elle ne sont pas directement efficaces sur le col, préparent notre corps à l’arrivée de notre bébé. Un peu de positif et d’encouragement dans ce contexte aurait vraiment été le bienvenu de la part du personnel hospitalier… J’ai découvert qu’un bébé pouvait naître sans savoir téter. Grande surprise pour nous. Mais je vous le raconterai dans un autre article, nous arriverons finalement à mettre en place cet allaitement.

J’ai mis plus d’un mois à m’en remettre physiquement, près de trois mois à m’en remettre psychologiquement. Peut être même plus. Par contre, je savais exactement ce que je ne voulais pas pour mon deuxième accouchement…  

[Carnet d’expat] Yu Garden au Nouvel An

L’an dernier, occupée que j’étais entre ma grossesse et la préparation de notre voyage au Japon, j’en ai oublié d’aller visiter Yu Garden au temps du Nouvel An. Cette année, c’est chose faite! Alors que Little Miss Sunshine avait décidé de faire l’école buissonnière, pendant la sieste de Little Smiling Buddha – que nous avons laissé aux mains d’Ayi -, nous avons rassemblé nos affaires et nous sommes allés nous promener dans la vieille ville. Dès le départ, Little Miss Sunshine a voulu être portée. Heureusement, j’avais emmené le Boba. La rue que nous avons empruntée est une jolie rue traditionnelle chinoise. Les maisons aux armatures en bois rouges bordent la rue très animée. Voitures, taxis, bus, vélos, triporteurs, scooters électriques, piétons se côtoient dans un joyeux brouhaha. Des lampions rouges accrochés ça et là, nous rappellent que la Fête approche. Les marchands de décorations rouges et dorés sont nombreux le long de la route. Les odeurs de nourriture se mélangent ce qui ne les rend pas toujours particulièrement alléchantes. Des Chinois, en famille, passent nombreux à côté de nous. Notre duo d’occidentales étonne, interpelle, comme d’habitude. Les Chinois se retournent sur la magnifique petite fille aux cheveux blonds et à la peau blanche qu’est Little Miss Sunshine. Au détour d’un croisement, nous tombons sur un marchand de barbe à papa. Je n’en avais encore jamais vu à Shanghai. Agile, il façonne de jolies barbes à papa colorées en forme de fleurs. Avant même qu’elle ne le réclame, je savais que j’allais lui en offrir une. Little Miss Sunshine a pu choisir les couleurs de sa barbe à papa. Comprendre un peu de Chinois nous facilite maintenant beaucoup la vie! Côte à côte, concentrées sur notre barbe à papa, nous avons continué notre promenade dans les jolies rues typiques autour de Yu Garden. Little Miss Sunshine, la bouche et les doigts maculés de sucre bleu, continue de faire son petit effet. J’ai parfois l’impression d’être son garde du corps, juste là pour chasser les photographes un peu trop insistant. Il faut dire qu’elle est belle, radieuse même avec sa barbe à papa.

En entrant dans l’enceinte du temple de la ville, on est tout de suite plongé dans l’ambiance du Nouvel An. Des décorations en plastique, souvent gonflables, sont accrochés un peu partout. Pour l’entrée dans l’année du Singe, on s’en doute, c’est l’animal favori des Chinois! Mais on trouve également son grand ami le cochon, ainsi que des pêches, le fruit de l’année. La foule se fait plus pressante, plus étouffante quand on approche des scènes géantes représentant les moments clefs de l’histoire et des légendes chinoises. En approchant de la maison de thé sur l’eau, qui se trouve au centre de Yu Garden, la foule gronde. On entend à peine la musique, pourtant assourdissante dans les ruelles alentours. Je prend Little Miss Sunshine dans les bras, remercie le ciel d’avoir laissé Little Smiling Buddha à la maison avec Ayi, dit à Little Miss Sunshine de hurler si quelque chose ne va pas et nous nous laissons porter par le flot humain… Jamais je n’ai ressenti un tel flot humain ailleurs qu’en Chine. La foule est vraiment angoissante ici. On se pousse, on se bouscule, on veut passer devant, l’individualisme atteint son paroxysme. Vieillards, jeunes enfants, bébés, femmes enceintes, tout le monde est poussé, tiré ou bousculé de la même manière. Nous réussissons malgré tout à nous faufiler jusqu’au bord du pont pour observer les différentes scènes et faire très rapidement quelques photos. Et pourtant, malgré le bruit et la foule, nous sommes heureuses de passer ses moments ensemble toutes les deux et nous en profitons au maximum. Little Miss Sunshine me murmure régulièrement des mots doux à l’oreille. Le contraste avec le vacarme ambiant est saisissant. Je suis heureuse!

Encore un dernier tour sur les grandes places de Yu Garden pour regarder les singes et nous avons pris le chemin du retour. Little Miss Sunshine était fatiguée. Et puis d’un coup, elle a réclamé de courir, de faire la course. Et c’est finalement main dans la main, en courant et en riant, que nous avons très rapidement trouvé un taxi pour nous ramener à la maison…

[Carnet d’expat] Marché couvert chinois

Au détour d’une rue commerçante, une ruelle couverte abritant un petit marché s’ouvre devant moi. Je ferme mon parapluie et m’y engouffre avec plaisir. L’heure du déjeuner approche et les douces odeurs de la cuisine shanghaïenne viennent me chatouiller les narines. Un marchand de fruits et légumes assis au milieu du chemin sur un petit tabouret de bois usé épluche un légume qui m’est inconnu. Les pelures tombent à même le sol, sur les petits carreaux jaunâtres usés par les milliers de Chinois passés par ici avant moi. Je jette un coup d’oeil à son étal. Des mandarines, donc une coupée en deux pour montrer son produit aux acheteurs, à moitié desséchée fait triste sur les petites boules oranges vifs. Des fraises. Certaines dans des barquettes sous film alimentaire, d’autres joliment empilées dans des bassines métalliques. Elles sont bien rouge et plutôt grosse. Il parait qu’autour de Shanghai, dans la campagne environnante les fraises poussent sous serre durant les mois d’hiver. Et puis d’autres fruits encore, dont je en connais pas le nom. Je les vois pourtant souvent et serai bien curieuse de les découvrir. Notamment une petite boule marron jaunâtre qui me fait envie. Elle est retenue par grappe avec ses copines, sur une petite branche. Il me semble que l’extérieur est plutôt dur, un peu comme un litchi dont il faudrait enlever cette partie très croquante. A côté, un poissonnier. Ou plutôt, une poissonnière. Elle me sourit et me montre ses crabes et ses tortues. Les crabes sont prisonniers, mais vivant dans de grands bacs en inox au fond percé. Des sortes de paniers en inox recouvert d’une plaque de verre pour laisser tout loisir à l’acheteur de vérifier la fraicheur de la marchandise avant l’achat. Certains sont déjà noué, et prêt à l’achat. Une cordelette grise et blanche les empêche de bouger. Ils sont ficelés, comme nous ficelons nos cadeaux à Noël. Ils me font mal au coeur. Et que dire des tortues à carapaces molles, prisonnières d’un filet en plastique rouge, qui trônent sur l’étal juste à côté des paniers de crabes. Je poursuis mon périple. Un peu plus loin, un boucher. Plusieurs personnes s’affairent, négocient, tâtent la viande devant l’étal. Une femme boucher découpe un morceau de porc avec une énorme hache. La client parle fort, gesticule. Les négociations se poursuivent. Le boucher fini par lui tendre sa facture et son sac en plastique transparent contenant tous ses achats. Mon regard est attiré par ses mains recouvertes de gants en tissus blanc couvert de sang et le bout de papier ensanglanté qu’il tient entre deux doigts. La viande est belle. Du porc. Uniquement du porc. Des morceaux qui ne me sont souvent inconnus. Contrairement aux apparences, la viande est fraîche et ne sent pas. Un autre boucher prépare des rognons pour une cliente. Je regarde ses mains agiles courir sur le couteau avant de séparer les abats en deux et d’en enlever certaines parties blanchâtres. Mes oreilles m’attirent vers un étal un peu plus loin. Un vendeur d’épices. Il y a beaucoup de choix. Je reconnais des baies de poivre noir et de poivre du Sichuan. Mais d’autres jolies baies rouges ou blanches ornent son étal dans de jolis petits sacs de jute. Le vendeur d’épices est en train de moudre un mélange pour deux clientes. Il s’y reprend à plusieurs fois avec son vieux mixeur en inox avant de montrer le résultat aux deux femmes. Il y a beaucoup de poissonniers dans ce petit marché couvert. La plupart possèdent des bacs en polystyrènes rempli d’eau où s’entassent des dizaines de poissons ou de creveetes vivants, mais incapable de bouger compte tenu de l’espace. D’autres, une minorité, présentent leurs poissons morts, parfois découpés, sur de la glace. La plupart ont accroché, au-dessus de leur tête des poissons salés qui sèchent. L’odeur est forte à ses endroits. Beaucoup de vendeurs proposent des plats préparés à la minute ou réchauffé à la vapeur ou au wok à emporter. Toutes ses odeurs me donnent faim. Il est déja l’heure de rentrer préparer le déjeuner. Juste en quittant le marché couvert, je passe devant l’étal d’une petite vendeuse de pelote de laine. Elle n’a que quelques pelotes de couleurs à vendre. De jolies pelotes vertes pommes me font de l’oeil. J’hésite, puis repars finalement sans rien acheter. Il sera toujours temps de revenir un jour prochain si l’envie m’en prend…