Par une froide matinée de la fin du mois de janvier, j’avais rendez-vous dans l’ancienne concession américaine, Hongkou, où je n’avais encore jamais mis les pieds depuis mon arrivée à Shanghai, pour une visite guidée du quartier de Tilanqiao. La température frôlait 0°C ce jour-là et nous avons même eu droit à des flocons de neige durant tout notre parcours – les premiers que je vois à Shanghai!
Notre guide était vraiment très intéressant. J’ai appris beaucoup de choses sur l’histoire des anciennes concessions qui me donne envie d’approfondir le sujet et de faire quelques recherches personnelles.
Nous avons commencé par visiter quelques Lilongs populaires et par parler de Frederick Townsend Ward et de la révolte des Taiping dans les années 1860.
Nous sommes rentrés dans quelques cours qui ne payaient pas de mine de l’extérieur, mais qui révélaient de très jolies villas à l’intérieur, bien que pas rarement bien entretenues.
Nous nous sommes promenés dans l’ancien quartier juif de Shanghai, nommé au courant de la seconde guerre mondiale, la zone désignée pour les réfugiés apatrides.
La concession internationale de Shanghai était un endroit relativement sûr pour les Juifs à cette période, comparé à ce qui se passait dans le reste du monde. Ils étaient certes obligés de vivre dans la zone désignée pour les réfugiés apatrides, mais étaient surveillé par leur paires et pouvaient en sortir pour aller travailler dans d’autres quartiers. La municipalité de la concession internationale faisait de cette ville dans la ville une zone franche. Nul besoin de visa pour fuir l’Allemagne, un simple billet de bateau jusqu’à Shanghai suffisait. C’est ainsi qu’environ 20 000 juifs ont pu fuir l’Europe nazie et se réfugier à Shanghai.
A leur arrivée, ils étaient pris en charge par des associations caritatives juives américaines qui leur fournissaient vivres, argent, couverture et abris. Et lorsque le chef de la Gestapo, en visite à Shanghai, alors aux mains des Japonais, essaie de convaincre ses derniers d’appliquer la solution finale, il essuie un refus. Malheureusement, quelques mois avant la fin de la guerre, le quartier juif, et tout Hongkou d’ailleurs, sera bombardé par les Alliés.
On trouve encore quelques traces de la présence des juifs allemands dans le quartier, comme ici le nom de la ruelle « Chusan Liegh » en fer forgé, mais les destructions vont bon train…
Il y a quelques années, le premier ministre israélien est d’ailleurs venu inaugurer une plaque commémorative de ses événements dans le parc du volcan situé au coeur de ce quartier.
Nous avons continué notre promenade et notre observation des bâtiments. Voici par exemple, le théâtre du quartier, une des plus belles façades art-déco de Shanghai, pourtant quasi-invisible derrière un amas de fils électriques et une affreuse enseigne de restaurant…
Mais Hongkou, c’est aussi l’ex-concession internationale et on repère ça et là l’influence européenne dans les constructions. Dans cette rue, on se croirait presque en Angleterre…
Nous avons poursuivi notre visite en faisant le tour de la prison de Tilanqiao. Construite de 1901 à 1903, elle était alors la prison la plus grande et la plus moderne du monde. On y a pratiqué la peine de mort – par pendaison jusqu’au début du siècle dernier et depuis par balle. Aujourd’hui, il y a toujours quelques 1 000 ou 2 000 détenus dans la prison, mais il n’y a officiellement plus de mise à mort à l’intérieur de Shanghai – c’est la seule prison de Shanghai à l’intérieur de la ville.
Enfin, nous avons pris le chemin du temple Xia Hai. Et en chemin, nous avons eu la chance d’assister à deux rites funéraires différents et distincts.
En Chine, un des rites funéraires consistent à brûler de l’argent et des affaires du défunt dans la rue, devant la maison où il vivait, ou à l’endroit où il est mort. C’est ce que l’on peut observer sur la première photo. Sur les deux suivantes, il s’agit d’un autre rite funéraire. Les Chinois croient que l’autre monde est à l’image du nôtre. Il faut donc que le défunt emmène avec lui, une maison, une voiture, un canapé, une montre,… tout ce qui lui sera nécessaire dans sa nouvelle vie. Le tout est en carton et en papier pour brûler facilement.
Le temple de Xia Hai était le dernier temple que les marins croisaient avant de prendre la mer en quittant Shanghai. C’est donc un temple qui était dédié aux marins pour les protéger avant de partir en mer. Aujourd’hui, le port est plus loin, même si des bateaux partent encore de Shanghai, mais le temple est toujours en activité.
On peut observer dans les rues que l’on approche des fêtes de la Nouvelle année chinoise. En effet, un peu partout dans les quartiers populaires, les Chinois font sécher certains mets pour fêter la Nouvelle année. On trouve donc des poulets, des canards, des saucisses et même des poissons qui sèchent dans la rue depuis le début du mois de janvier…
Ce fut une très belle matinée de découvertes historique de Shanghai…