Je n’ai jamais eu de problèmes avec les évaluations durant toute ma scolarité. J’étais cette élève qui adore apprendre par coeur, qui adore avoir des devoirs et qui rentrait le soir en demandant à sa mère de l’interroger sur les leçons du lendemain. J’ai toujours aimé l’émulation que provoquait en moi le fait de savoir que j’étais première, deuxième ou troisième de la classe. Je n’ai jamais eu de réels soucis scolaires.
Le système français, mais ce n’est pas le seul, créé une réelle concurrence entre élève. Il faut être bon. Mais ça ne suffit pas. On peut mieux faire. Il faut être le meilleur. Je n’ai jamais eu de problème avec cette logique, j’ai été bien formaté par le système apparemment. Au point d’être passée par les classes préparatoires littéraires, d’avoir passé plusieurs concours. Et je n’en garde pas de mauvais souvenirs!
Mais je suis tout à fait consciente que tout le monde n’a pas mon état d’esprit, que je suis un peu un être à part de ce côté-là. Et je conçois tout à fait que cette course à l’excellence, que cet atmosphère de compétition, peut plonger certains élèves dans un réel mal-être. Pour un bon ou un très bon élève, la notation peut effectivement être un moyen d’émulation, pour un élève moyen ou qui a peu confiance en lui, cela peut vite devenir problématique.
Je savais qu’en France, l’Education Nationale préconise d’évaluer les enfants dès la première année de maternelle. Et j’avoue que ça me dérange énormément. L’école maternelle, en tout cas pour moi est un moment pour l’enfant pour découvrir le monde, la vie en collectivité, jouer en groupe, commencer à manipuler du matériel (crayon, ciseau, pinceau, …). Mais le plus important, c’est que c’est le moment de donner à l’enfant cette curiosité, cette envie d’apprendre qui lui facilitera toute sa scolarité par la suite. Alors de là à l’évaluer…
Le premier semestre de Little Miss Sunshine vient de se terminer. Le temps pour moi de découvrir les fameuses évaluations. Little Miss Sunshine est dans une école internationale, elle est donc doublement évaluée: en français, selon les préceptes de l’Education Nationale et en Chinois, selon les préceptes chinois.
J’avais rendez-vous avec la maîtresse française de Little Miss Sunshine à la fin du mois de janvier. Et j’appréhendais. Je ne voulais pas me retrouver face à quelqu’un qui allait me dire que Little Miss Sunshine avait tel ou tel problème, qu’elle ne faisait pas ceci ou celà comme il lui était demandé,… A la maison, Little Miss Sunshine a toujours eu beaucoup de liberté. A l’école, ce n’est clairement pas le cas. Mais c’est aussi le moment pour elle d’apprendre la vie en communauté car malheureusement personne n’y échappe au cours de sa vie.
Finalement, j’ai été agréablement surprise par notre entretien. Il s’agit bien sûr d’une maîtresse de l’Education Nationale, mais elle est tout à fait consciente que le plus important du premier semestre de l’école maternelle, c’est l’intégration de l’enfant dans sa classe et dans son établissement. Et pour ça, Little Miss Sunshine s’est très bien débrouillée. En fait, on ne m’a fait presque que des compliments sur ma petite fille. Un seul souci, elle n’est vraiment pas à l’aise dans la tenue d’un crayon ou d’un ciseau. Nous avons parlé de plusieurs pistes:
- Little Miss Sunshine est droitière, mais encore un peu jeune pour avoir eu déja le déclic pour la tenue de ce matériel, malgré la répétition des manipulations.
- Little Miss Sunshine est gauchère, mais par imitation de son entourage, elle utilise majoritairement la main droite.
- Little Miss Sunshine est ambidextre et elle n’est pas encore prête a déterminer sa main dominante.
Je penche dans tous les cas pour le fait que Little Miss Sunshine est encore un peu jeune. Elle a un an de moins que les plus âgés de sa classe. Aucune comparaison n’est possible. Alors je vais continuer à l’observer discrètement et à lui proposer des activités de motricité fine. La maîtresse me propose de l’observer pendant un mois ou deux et de refaire un point à ce moment-là. Elle me préconise tout de même de voir un psycho-motricien si rien ne se débloque d’ici la fin de l’année. J’ai envie de dire qu’on verra…
Je verrai la maîtresse chinoise, avec une interprète anglaise, la semaine prochaine. Mais j’ai déja pu voir les observations faites. Et c’est très intéressant. En Chine, on n’attend pas du tout la même chose d’un enfant de première année de maternelle. C’est beaucoup orienté sur l’expression corporelle (savoir marcher sur une ligne, lancer un ballon, monter et descendre un escalier, courir au moins 15m, manger avec une cuillère, s’habiller, se déshabiller seule ou avec l’aide d’un adulte, …), le language, mais pas pour les mêmes raisons que nous ( par exemple savoir donner son nom, le nom de ses parents et son adresse à un policier) En fait, à bien y regarder, les acquisitions sont très ciblées, très détaillées. On demande à l’enfant de savoir s’apaiser en cas de pleurs avec l’aide d’un adulte, de prendre soin des jouets et des affaires de la classe, d’aimer être responsabilisé sur de petites tâches,… Bien évidement, Little Miss Sunshine commence tout juste à dire quelques mots en Chinois et ne comprend que peu de choses pour l’instant, si ce n’est les consignes qui reviennent quotidiennement à l’école, alors pour la partie chinoise, son évaluation sera bien mois avantageuse.
L’enfant n’étant pas présent lors de ses rencontres, j’ai décidé de ne pas trop en parler à Little Miss Sunshine. Je lui ai juste dis que je rencontrai sa maîtresse pour parler de ce qu’ils font à l’école, mais je ne lui ai pas parlé du retour que j’ai eu. Je pense qu’on lui met déja bien assez la pression à l’école pour que je ne lui mette pas la pression à la maison! En fait, je trouve ce système d’évaluation, bien qu’il soit un moyen de communication entre les parents et la maîtresse – mais cela pourrait se passer dans un cadre différent! -, très difficilement adaptable à une éducation bienveillante. On a pas grand chose à dire des choses positives, on passe beaucoup de temps sur le négatif et une fois de retour à la maison on a essentiellement retenu les points négatifs. C’est pour ça que je trouve important de ne pas en parler à l’enfant…
Et vous, comment vivez-vous les différentes évaluations à l’école maternelle? Et en parlez-vous avec eux?
Bonjour,
Pour ma part, j’ai redouté l’entrée en maternelle. Parce que j’ai essayé de faire grandir mon enfant dans la bienveillance aussi. Et pour moi, le système français comporte beaucoup de point négatif, à commencer par les fameuses évaluations. J’aurais aimé pouvoir lui offrir des écoles alternatives comme Montessori ou Freinet, ou un enseignement à la maison. Mais ce n’est pas dans mes moyens. Alors il a intégré l’école, et toutes ses règles que l’on a pas chez nous. Il adore bien sûre, car il aime voir du monde, et les activités. Mais il y a les punitions. Et depuis lz rentrée, beaucoup trop les mots « méchants » dans sa bouche. Alors moi je me suis dit que j’allais essayer de participer au maximum à la vie de la classe pour répandre ma bienveillance, et qu’au fond, il était quand même heureux ainsi. Parce que lui ne mesure pas tout ça, et se passionne d’apprendre. Mais c’est dur de le faire rentrer dans ce système…
Merci du partage en tout cas 🙂
@MamanPiim: Ce système est compliqué à mettre en adéquation avec des principes d’éducation bienveillante. Après tout dépend aussi de l’état d’esprit du personnel qui gravite autour de l’enfant (maîtresse, atsem en France / ayi en Chine, directeur, personnel de cantine…) Je n’ai pas encore entendu parler de punition, mais dans ce cas, il est clair que je ne réagirai pas très bien!!! D’un autre côté, quand les enfants ont l’air de s’épanouir dans le contexte (ce qui a l’air d’être le cas de nos deux Loulous), il vaut mieux ne pas trop s’inquiéter, ils savent s’adapter. Le tout est de bien leur expliquer notre point de vue en amont – je pense par exemple à notre cas de main dominante qui n’est pas encore déterminé, je lui répète autant que je peux qu’il faut qu’elle écoute son corps et ses sensations, qu’elle utilise la main qui lui va le mieux -, ce qui leur permet déja de savoir qu’on les soutien et qu’on est à leur écoute et puis ne pas hésiter à parler d’une situation que l’on estime « douteuse » avec la maîtresse. C’est un savant équilibre entre nos principes éducatifs et ceux de l’école. Merci d’avoir partager ton expérience! Je trouve ça tellement intéressant de confronter nos points de vue de maman!
Je ne savais même pas qu’il y avait des évaluations à la maternelle, cela me semble tellement peu naturel.
Par contre si ma fille était évaluée selon les critères chinois, elle serait au top sur certains points. J’insiste beaucoup sur sa capacité à dire son nom, prénom et autant que possible celui de ses parents. Par contre la consigne n’est pas d’aller voir un policier (où le trouverait-elle) mais une maman ou un papa.
@Tiphanya: Eh oui, je crois même qu’en France, ils ont déja un bulletin! Et ça commence chez les Tout-petits si ton deux ans entre à cet âge à l’école… Ca me hérisse le poil, mais c’est ainsi pour l’instant. En espérant, qu’un jour ou l’autre une vraie réforme réfléchie et qui va dans le sens de l’enfant remettent les choses en question…
Little Miss Sunshine connaît aussi nos noms, prénoms, adresse à Shanghai, son âge, elle sait donner pas mal d’informations sur elle on l’écoute et qu’on parle français. Elle connaît aussi son adresse en Chinois. Mais je pense que ce qui la bloque avant tout pour l’instant, c’est de répondre à une question en Chinois, je crois que ce n’est pas très naturel pour elle pour l’instant. Mais ça ne fait que quatre mois qu’elle a commencé le Chinois alors j’ai bon espoir! Et j’ai remarqué que depuis que j’ai moi-même commencé à apprendre le Chinois et que je lui en ai parlé, elle me pose beaucoup de questions et à l’air beaucoup plus intéressé! C’est peut être le déclic qui lui manquait!